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30 octobre 2011 7 30 /10 /octobre /2011 21:19

Nota :  Cette article est une reprise de réponse que j'avais publié dans un forum de psychologie où il était demandé conseil sur des ouvrages de développement personnel.  Alors que de nombreux contributeurs indiquaient des auteurs réputés dans ce domaine particulier, comme Gounelle, Krishnamurti, Jorodowski, Castaneda, le Dalaï Lama etc... , j'indiquais que la littérature traditionnelle et la philosophie étaient pour moi les meilleurs ouvrages de développement personnel qui soient car ils n'indiquaient pas de recette de cuisine mais transmettaient plutôt une "éducation émotionnelle" au lecteur, au moyen de  son identification aux différents personnages des romans, quels qu'ils soient. Et que les meilleurs auteurs étaient ceux qui pouvaient le mieux et le plus finement transmettre cette palette émotionnelle subtile, infinie en compositions possibles.

 

Jeune, vers l'age de 15 ans j'ai été un assassin et j'ai connu la rédemption dans la peau de Raskolnikov (Crime et Chatiment de Dostoieski). J'ai prolongé mon expérience par le crime gratuit et l'automutilation à 16 ans avec Les caves du Vatican d'André Gide, les plaisirs interdits de l'Immoraliste .  J'ai connu la différence et l'insenbilité, étranger à tout ce qui m'entourait à 17 ans quand le même jour, j'ai perdu ma mère, été m'amuser à la piscine et ai tué quelqu'un sur la plage avec l'Etranger de Camus. A 18 ans j'ai connu les haines et les rancoeurs familiales, véritables poisons, avec Le Noeud de Vipères de François Mauriac.  Plus tard j'ai eu le sentiment éphémère et triste de la vie courte comme une journée pluvieuse - Une Vie de Mautpassant. Mikhail Boulgakov a illuminé soudainement ma vie en lui donnant des couleurs fantasques et romantiques (Le Maitre et Marguerite), mais aussi parfois cyniques, folles et non conformistes avec le diable Woland. Hermann Hesse - Le Loup des Steppes -  m'a fait entrer dans son théâtre "Seulement pour les Fous" à plusieurs reprises me faisant entrevoir mieux le multiple, les possibles, l'épuisement de la répétition.  Le voyage vers l'infini a continué avec Borges - Fictions - , et ses paradoxes vertigineux propres a faire vaciller mes dernières certitudes rationnelles. J'ai voulu connaitre toujours plus l'humain jusque dans sa chair et ses profondeurs obscures, luttant au péril de ma vie contre l'obscurantisme, mais aussi en satisfaisant ma curiosité morbide,  transgressant les interdits  pour disséquer des cadavres (l'Oeuvre au Noir de Marguerite Yourcenar). A la recherche obstinée de quelque Vérité ultime - pierre philosophale. Et puis encore plus tard, Cotzee m'a rapproché de la condition humaine et de ses faiblesses me permettant une forme de réconciliation avec moi-même. Je m'en suis sentit  proche, comme un ami intime, dans Disgrâce... Récemment "La Route" de Cormac Mac Carthy m'a bouleversé au point de considérer chaque jour, même le plus terrible, comme un cadeau.

 

Parfois il faut trouver le lieu et les circonstances pour rencontrer un auteur et son oeuvre : J'ai lu "Ainsi parlait Zarathoustra" de F. Nietszche dans l'air rare des cimes lors d'un fantastique voyage en Inde à  Darjeeling, puis au Népal. La lecture s'accordait parfaitement avec les sommets himalayens vertigineux. Conjuguée à la marche parfois très pénible, solitaire et silencieuse, les bouffées d'oxygènes de ce trésor  inclassable (roman, poème, ouvrage philosophique, prière..?) m'incitaient au dépassement. M'approchant  plus près de l'Auteur  je ressentais physiquement, dans ma chair, les passages de son oeuvre, ceux qu'il avait "vu", illuminé, lui aussi marchant en Montagne. 

 

La littérature m'a été de la plus grande aide au cours de ma vie. Peut être plus que tout; car j'y ai rencontré là, dans des voyages au bout de mes nuits de solitude, des frères en la personne de personnages de romans et donc des frères en la personne d'écrivains souvent disparus. Et qui revivaient ainsi en moi, m'honoraient de leur présence. Beaucoup souffraient de maux similaires. Et c'est très troublant quand on a l'impression qu'une personne disparue il y a cent ou deux cents ans, parfois mille ans, s'adresse à nous, en particulier... On se dit que cet écrivain cherchait peut être désespérément son "lecteur" et on le remercie infiniment de ce qu'il a fait pour nous, su dire, transmettre comme émotion. On lui parle en nous même comme on pourrait le faire lors d'une prière silencieuse et profonde à un parent cher disparu. La littérature  m'aide encore à combler mes propres insuffisances, a mettre des mots sur mes impressions. A les comprendre et à les accepter à travers la rencontre avec l'Oeuvre.

 

Aujourd'hui des dizaines de romans forts me constituent pour partie, au même titre qu'un certain nombre d'expériences marquantes, ou de rencontres surprenantes. La littérature a été et demeure pour moi un axe essentiel de mon développement personnel. Elle est un accélérateur d'expérience extraordinaire.

 

Nb : Ma bibliothèque idéale

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commentaires

E
Merci de partager cette expérience avec vos lecteurs !
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P
<br /> Merci, les feed-backs me font toujours plaisir ;)<br /> <br /> <br />
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