Dans le chamanisme, deux domaines de développement semblent importants :
1/ L’art du Guêt,
qui me semble identique aux pratiques de Méditation de l’Attention des bouddhisme, indouisme ou taoisme. Il s’agit de
pratiquer régulièrement des exercices méditatifs visant à atteindre un état de pleine conscience. Pour l’avoir pratiqué souvent, en hypnose ou en méditation, cette pleine conscience
s’apparente paradoxalement à une totale défocalisation (du regard par exemple) et par une extrême sensibilité à tout ce qui se présente. Cette pleine conscience est accompagnée de temps en
temps d’une dissociation où le mental en cas d’événement ou de sensation particulière est capable d’observer à distance tout ce qui se produit dans le corps. Cette capacité aide grandement
à domestiquer les émotions en les observant. Comme si le Mental était séparé entre un Mental Supérieur qui est toujours là et qui observe, et un Mental Inférieur très proche des émotions et du
corps. La pratique régulière de la Méditation de l’Attention conduit au développement du Mental Supérieur et permet la dissociation immédiate en cas d’émotion perturbatrice (colère, peur) et
ainsi la réduction de ces émotions par observation neutre et distante.
En hypnose, il est surprenant au début de constater que durant la transe on peut être à la fois conscient, observateur de
ce qui se passe à un autre niveau que l’on nomme l’Inconscient ou Corps. Ainsi durant une lévitation du bras, une partie de moi (nommée observateur caché) va pouvoir avec amusement observer ce
bras qui se lève tout seul, comme automatiquement, commandé par mon Inconscient.
C’est la même chose qui est visé par la méditation de l’Attention. Développer le pouvoir et la continuité de cette partie
observatrice attentive. L’Art du Guêt dans le chamanisme vise a atteindre la transe attentive du Chasseur totalement disponible à l’observation sensorielle de tout ce qui se produit dans
son environnement. L’animal chasseur à l’affut, immobile durant de longues minutes, me semble aussi dans cette transe et je considère cette faculté comme un reliquat oublié de notre passé
animal.
2/ La Conduite des Rêves.
Pour les chamanes, les rêves sont aussi importants que la réalité. La maitrise des rêves peut influencer la Réalité vécue
et inversement l’Art du Guêt permet de développer la capacité à piloter ses rêves de façon quasi consciente, de faire des rêves lucides. Le chemin de l’apprenti chamane sur l’Art du Guet et
vers la Conduite des Rêves donne des effets étonnants : L’attention y est de plus présente quel que soit l'Etat, aussi bien dans la Réalité que dans le Rêve et les deux ensembles de vie finissent
de façon surprenante par converger en une sorte de continuité. La Vie y prend un relief un peu plus magique et le Rêve devient proche de la Réalité vécue.
J’ai eu mes deux premiers rêves lucides il y a peu. La première difficulté pour se mettre dans l'état de rêve lucide
est de « repérer une séquence habituelle de rêve» qui permette de se poser la question : « Est-ce que je rêve ? ». Ensuite à interroger la « réalité » du
rêve par l’observation. Victor Sanchez dans « Les enseignements de Don Carlos » donne un truc qui est : lever et d’observer ses mains.
Alors que j’étais en voyage à La Réunion, une nuit, j’ai eu un rêve où je cherchais à rejoindre un groupe
désespérément, ayant perdu encore mon chemin. Ce type de rêve, où je me perds, étant assez habituel, je me suis dit alors « ce n’est pas possible, je rêve encore » et une émotion
particulière m'a permis de m'en convaincre.
J’ai observé le décor autour de moi par curiosité, observé les couleurs, senti l’air sur mon visage, respiré les odeurs,
touché les textures avec attention… Rien ne pouvait me dire en apparence si j’étais dans la Réalité ou dans un Rêve. C'était incroyable finalement comme la réalité produite par mon Rêve - mon
esprit - ne pouvait se distinguer de la Réalité habituelle. Une véritable surprise, une découverte !.
Alors, repensant aux Enseignements de Don Carlos, j’ai levé les bras pour observer mes mains : Et à ce moment j’ai été
pris d’un frisson très intense et je me suis dit « Je suis vraiment dans le Rêve ». J’ai levé les bras comme pour voler en y joignant la Volonté de décoller. Quelque chose qui
venait de la région du Coeur. Mais j’étais pris par un mélange d’exaltation et d’angoisse. Avec ravissement, j'ai décollé et je me suis mis à voler au dessus de la petite place dans
laquelle je me trouvais, la surplombant de quelques mètres.
Mais toujours pris dans cet état d’angoisse et de surexcitation, j’ai décidé, comme quelqu’un qui vient de prendre en main
un formidable instrument et qui a peur de le casser pensant qu'il est trop puissant par rapport à sa capacité actuelle à le conduire, de redescendre et de me poser. Ce que j'ai fait prudemment.
J’étais fou de joie. Et j’ai alors pensé : « Maintenant je vais me réveiller pour voir ». Je me suis immédiatement retrouvé dans mon lit sentant mon corps encore parcouru par la
nervosité, des tremblements dans la nuque et un état proche de la tachycardie. Incroyable.
Lors de mon
second rêve lucide, j’étais à la Défense, et j’ai volé à nouveau en utilisant la même séquence que précèdemment, allant toucher les vitres fumées des tours. La difficulté principale était cette
fois ci, plus encore que dans la Réalité et les exercices de Guêt, de garder l’Attention sur la conduite du Rêve, sur le voyage et la façon de se déplacer. Il fallait trouver un subtil état
d’équilibre pour pouvoir se déplacer sans que la volonté ne soit trop forte en gardant la fluidité du lâcher-prise et aussi ne pas être trop distrait au risque de replonger dans le rêve standard
et de perdre la lucidité. Ce qui est arrivé cette fois.
C’est assez
rigolo de constater que comme dans le film Inception, des pensée parasites peuvent perturber le décor du Rêve. Que celui ci peut se transformer par l’imagination, se désintégrer, pour peu que
cette idée vienne s'imposer à l’esprit. Il y a donc cet entrainement à poursuivre avec persistance, comme dans la méditation de l’Attention, de revenir systématiquement en cas de pensée
parasite à la pleine présence en abandonnant immédiatement les pensées en question aussi rapidement qu'elles se sont présentées.
Les deux pratiques, Art du Guêt et Rêve Lucide me semblent donc extrêmement complémentaires, s’enrichissent mutuellement.
Se confondent si l'on y réfléchit bien.
La prochaine
étape me semble être de progresser dans le Contrôle du Rêve sur une plus grande durée et de visiter si possible durant la Nuit au même moment synchrone au Rêve, des endroits ou des personnes
connues. Peut être un jour à venir me regarder dormir ou alors chatouiller les pieds d'un proche pour voir.
Si l'on y croit
évidemment. Je viendrais peut-être un jour chatouiller ...