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15 janvier 2014 3 15 /01 /janvier /2014 16:57

Le Loup de Wall Street, dernier film de Martin Scorcese raconte l’histoire de Jordan Belfort, un trader « successful » ayant monté sa propre société de courtage et fait fortune en usant et abusant de mensonges, abus de faiblesse, manipulation des cours etc. Il sera stoppé dans son ascension par quelques flics intègres du FBI, représentants incorruptibles du petit peuple des grugés.

 

Ce qui revient de façon récurrente dans cet excellent film c'est le cynisme et l’obscénité. L’argent, le sexe et la drogue sont omniprésents dans l'univers de Jordan Belfort (magistralement interprété par Léonardo Di Caprio) et de ses acolytes. L’omniprésence jusque l'obscènité des "signes extérieurs de richesse" et de la débauche consummériste transforme le tout en décor insipide de clip de rap pour MTV. Le réel semble de ce fait n’être jamais satisfaisant et vide de sens. Reste une jouissance épuisée par la saturation. La chimie de l'overdose change tout en toc, l’argent perd sa valeur d'usage, le yacht désert respire l'ennui, les poupées siliconées s’avèrent de la même espèce que les traders les plus impitoyables auxquelles elles se vendent. Pour compenser ce vide les drogues doivent d’être de plus en plus puissantes afin de redonner un semblant de relief à la vie.

 

Ce qui est intéressant à mon sens, c’est qu’en faisant jouer Léonardo Di Caprio, belle gueule, sympathique et bourré de charisme, sans jamais montrer tout au long du film le moindre client ruiné ou « dommage collatéral » direct de son activité, Scorcese ne tombe pas dans la caricature ennuyeuse de la leçon de morale à l’américaine. Belford chutera de son piédestal certes, en trahissant cyniquement ses collègues - comme il a trahit ses clients - en négociant une remise de peine pour bon comportement et passera au final trois années dans une prison dorée, sorte de « camp de vacance » néo libéral où tout peut s’acheter encore plus qu’ailleurs. Il est encore riche. Il rebondira à la fin du film comme conférencier de génie transmettant à un public conquis de commerciaux en herbe ses "méthodes de vente" infaillibles. En parallèle, les « petits flics » du FBI qui l’auront coffré continueront le vie modeste et laborieuse partageant le métro quotidien des autres « laissés pour compte » du système. 

 

Scorcese a su rompre avec sa pattern habituelle : dérive individuelle – crime – châtiment – rédemption. Ici le crime est comme « minoré » par l’invisibilité des victimes et le châtiment individuel quasi inexistant. Et l’obscénité de l’ensemble du système ressort d’autant mieux. Un système de joueurs cyniques dépourvus de morale. Reste le dégout, l’impuissance et la colère face à ce système que quelques Madoff sacrifiés ne sauront dissimuler.

 

Un film à voir absolument !

 

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