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14 novembre 2011 1 14 /11 /novembre /2011 19:57

Une des phases essentielles de la Thérapie me semble relever de "l'Acceptation". Qu'est ce à dire ?

 

On a coutume de dire dans les thérapies brèves que ce sont les tentatives de résolution du problème - qui peuvent revêtir différentes formes - qui entretiennent bien souvent le problème.

 

C'est particulièrement vrai pour les émotions, sensations gênantes, ruminations, fatigues, douleurs  et autres gênes etc...

Lorsqu'elles apparaissent, les personnes par une réaction "normale" et une louable volonté de guérir, cherchent absolumment à les supprimer, à les faire disparaitre en faisant des efforts . Redoutant parfois par anticipation, régulièrement, que celles ci ne réapparaissent, et fassent irruption à leur insu. 

 

Comme le disait Montaigne dans "Les Essais", "Qui craint de souffrir, il souffre déjà de ce qu'il craint"...

 

Or, pour les pensées parasites par exemple, un certain nombre d'études ont montré - et l'expérience personnelle le prouve assez facilement - que plus on essaie de ne pas penser à quelque chose et plus on y pense en fait . Il est impossible de ne pas penser par exemple à un "éléphant rose", une fois qu'il a fait irruption dans un train de pensée. Comment le faire disparaitre quand il occupe déjà la pensée, cet éléphant rose dans le désert, même s'il ne correspond à aucune réalité ? 

 

Cette incapacité a controler nos pensées est due pour une bonne part à la "puissance" du langage, celui ci pouvant par "contamination" assez facilement mettre en relation des sensations, idées, événements divers, dont certains douloureux. La capacité d'association du langage peut assez facilement donc faire resurgir les fantômes par le biais des pensées associatives...Par exemple cette mère de famille en pensant au mot "Juin" dans un contexte particulier pourra subitement ruminer le décès de son père un mois de Juin d'une année précèdente auquel elle n avait pu assister et se sentir coupable...

 

Les stratégies personnelles de "contrôle" de nos émotions et pensées parasites s'avèrent totalement impuissantes, augmentant par effet de feedback le problème - c'est par exemple le cas de la personne hyper timide qui doit faire un exposé à l'oral et qui plusieurs jours à l'avance stresse, n'en dort plus la nuit, en se disant qu'elle ne doit surtout pas trembler et a peur de se retrouver ridicule en public du fait d'un "vide" lors de sa présentation etc... -

 

Cette pensée même, va amplifier le problème, et s'avérer auto réalisatrice dans la majorité des cas. Notre éducation, entrenue par le langage nous apprend ce "qu'il faut faire" en toute circonstance. Et nous avons tendance a suivre automatiquement ce que le langage nous dit, bien qu'il puisse nous faire perdre contact avec les conséquences désastreuses de ses prescriptions.  En entretenant par exemple des stratégies d'évitement des pensées et des émotions, contre-productives pour le développement futur. L'incitation a controler sa peur, sa colère, ses pensées percçues comme négatives, ses émotions douloureuses, s'apprend très jeune. Nous nous interdisons, pour faire bonne figure, à les montrer.  Cette rigidité, cette perte de flexibilité semble être un dénominateur commun aux troubles psychologiques.

 

 

Or, la présence d'événements psychologiques désagréables est propre à la condition humaine. On peut même dire que cette capacité a éprouver des émotions, qu'elles soient agréables ou désagréables, a une utilité qui a été sélectionné par l'évolution. Il faut prendre ces émotions, sensations, douleurs etc. pour ce qu'elles sont : des messages.

 

Ce n'est pas la présence d'événements psychologiques difficiles qui constitue le "trouble psychologique", mais plutôt la lutte permanente, incessante et épuisante contre ces événements qui "est" ce trouble. Ce qui peut différencier une personne "malade" d'une autre c'est ce "qu'elle fait" de ces événements psychologiques. Si la lutte contre les émotions et sensations est  sans fin, c'est son intensité épuisante  qui va faire passer de la douleur (composante inéluctable de la condition humaine) à la souffrance.

 

En tentant d'éviter la douleur par différentes stratégies d'évitements expérientiels, la personne va certes résoudre ses peurs, émotions génantes  à court terme, mais en se privant de réalisations importantes et salutaires pour elle à moyen et long terme. Elle va se priver de son potentiel de développement, libéré.  Bien sûr, tous les évitements ne sont pas pathologiques, mais il importe de se demander lors d'un évitement de quoi l'on se prive au final...

 

L'évitement peut donc conduire à une perte de flexibilité , à une diminution du répertoire comportemental et donc à une réduction de "possibles" qui peuvent s'offrir à la vie dans différentes situations potentes.

 

Il convient donc, lorsque l'on croit - comme moi -  que la thérapie vise essentiellement a augmenter les possibles des Patients à faire le maximum pour augmenter leur liberté de choisir en augmentant les comportements possibles pour qu'ils puissent mieux conduire et choisir  leur vie, et les aider donc à repérer, à débusquer ces évitements limitants. Et à leur démontrer les conséquences délétères à moyen et long terme de ces mêmes évitements.

 

La thérapie va sensibiliser le Patient aux conséquences de ses actes, de ses comportements. Elle va l'aider à mettre en perspective ses bénéfices à court terme (éphémères) par rapport aux bénéfices potentiels et supérieurs à moyen et long terme qu'il pourrait obtenir sans l'évitement - en acceptant volontairement l'exposition expérientielle à court-terme accompagnée par son inhérente douleur. En acceptant volontairement et sans l'éviter cette douleur.

 

Lorsque le Patient "comprend" qu'il ne débarassera pas de sa douleur  et de ses gênes et que le thérapeute ne peut rien pour lui à ce niveau là , il peut et il va, dans la majorité des cas, vivre une phase de désespoir.  Car il va réaliser que tous les efforts qu'il a menés jusque là, si louables soient-ils, ont été vains, et plus encore ont pu même entretenir le problème.  Le Patient a pu penser bien faire et il importe que le thérapeute fasse preuve alors de pédagogie et soit très présent à ce moment là de la thérapie pour montrer au Client que l'énergie dépensée dans son combat à éviter ce qui le gêne à court terme, pourrait "par l'acceptation"  distante de ses émotions et gênes, être récupérée et mobilisée vers "autre chose" qui ai vraiment du sens pour lui. Cet "autre chose", qui compte réellement pour le Patient, qui va pouvoir donner du sens à son existence, va être alors l'objet du travail commun du Patient et du Thérapeute, une thérapie sur le Sens et l'Action.  Le Patient va devoir d'abord faire douloureusement le deuil de son "combat" court-termiste contre ses émotions, pensées parasites, douleurs, et leur laisser la "porte ouverte" comme des visiteurs habituels, vus comme des éléments familiers, même s'ils sont très désagréables et apprendre à les reconnaitre, les observer, les laisser vivre sans les combattre. Ils se feront moins fréquents et intrusifs du fait même du lacher prise. La guérison ne signifie donc pas du tout la suppression des gênes, mais au contraire leur acceptation distanciée qui va permettre dans le temps leur réduction et leur "oubli" de plus en plus fréquent.

 

Accepter, au sens éthymologique "Acceptare" veut dire "recevoir". Il va falloir apprendre au Patient, è développer l'observation de lui même "comme un autre" et à accueillir ce qui se présente avec détachement .  Il s'agit d'apprendre au Patient a entretenir par rapport à ses événements personnels une "curiosité détachée comme celle que peut avoir un enfant pour un insecte enfermé dans un bocal".  (Nota : la philosophie orientale enseigne le détachement ( Cf bouddhisme) et un certain nombre de pratiques la mettent en oeuvre comme le Yoga ou la Meditation par exemple).

Cette acceptation va constituer dans bien des thérapies, le changement essentiel et nécessaire du Patient  vers la guérison. Un point de vue différent sur ses émotions et ses problèmes personnels va être possible par l'acceptation et l'observation fine de soi-même, un peu plus neutre. Equanime comme disent certaines pratiques. 

 

Je terminerai cet article par une métaphore sur les sables mouvants :

"imaginez que vous marchiez en terrain marécageux et que vous vous trouviez pris dans des sables mouvants. Si vous vous débattez et essayez vivement de vous sortir de ces sables mouvants, que va t-il se passer ?. Quand on cherche à s'extraire des sables mouvants en se débattant, le résultat est qu'on s'enfonce davantage et plus vite.  La meilleure stratégie consiste au contraire a ne pas trop bouger et à faire "contact" le plus possible avec la surface, à faire "corps" avec le sable mouvant dans un premier temps, en l'acceptant pour mieux s'en dégager progressivement "

 

L'acceptation est l'une de Clefs de la Thérapie.

 

 

 

 

 


 

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